Storyteller. Crafting and weaving words, images and culture.
« Les différentes facettes de son métier consistent à saisir, transcrire et ciseler ce que les tendances et la vie des formes racontent de l’esprit du temps. »
Formée dans la presse quotidienne et magazine, notamment au quotidien Le Temps où Valérie Fromont devient une plume de la rubrique Culture et Société et des Hors-séries lifestyle, sa pratique se déploie au travers d’une vaste diversité de sujets et de genres éditoriaux. Des mouvements de société aux flux de consommation, des enquêtes aux grandes interviews en passant par les chroniques, les différentes facettes de son métier consistent à saisir, transcrire et ciseler ce que les tendances et la vie des formes racontent de l’esprit du temps. Elle se spécialise ensuite dans le design, l’architecture, la mode, l’horlogerie et la joaillerie, dont elle a une approche sensible et poétique, tout en adoptant sur ces domaines une perspective socio-culturelle, qui lui valent d’être reprise par Le Courrier International. Elle a également été responsable de plusieurs Hors-séries Design & Architecture du journal Le Temps. La danse et la littérature restent pour elle autant de territoires d’inspiration que de sujets qu’elle traite régulièrement.
Durant cinq années, Valérie Fromont tient au sein de l’édition suisse du magazine international L’Officiel une chronique dont les références éclectiques puisent autant dans Carrie Bradshaw que dans Platon, tout en réalisant des interviews, portraits et reportages sur les artistes et designers suisses pour les pages de ce magazine.
Son savoir-faire éditorial est ensuite mis au service de marques pour lesquelles elle transpose la singularité de sa voix sertie dans l’écriture journalistique pour produire des contenus et un design d’information coprorate à haute valeur ajoutée.
En reprenant la rédaction en chef des magazines de l’enseigne de luxe Bongénie Grieder, aux côtés de son partenaire professionnel de longue date Stéphane Bonvin, elle développe durant près de dix ans un vaste panel d’outils de communication pour définir l’identité éditoriale et iconographique de l’entreprise sur différents supports, avant tout dans le registre du print, mais aussi du digital. De la réinvention de la charte graphique à la redéfinition de l’ensemble des contenus magazines (In the Mood, Fashion Gallery, G Point, catalogue de Noël), elle met en scène dans l’esprit du temps les nouvelles collections des marques de luxe que l’enseigne représente en Suisse (Saint Laurent, Alaïa, Balenciaga, Valentino, Chloé, Alexander McQueen, Jacquemus…) En fédérant autour de leur projet éditorial des photographes, stylistes, illustrateurs, écrivains et artistes, ces magazines sont devenus de véritables objets de style, qui racontent l’allure et les codes d’une époque
« Des magazines conçus comme de véritables objets de style, qui racontent l’allure et les codes d’une époque. »
Au-delà de l’écosystème éditorial qu’elle a mis en place, Valérie Fromont a pris la direction créative des productions iconographiques, dont les images ont alimenté les magazines tout comme les campagnes institutionnelles de Bongénie Grieder durant près de dix ans. S’adjoignant des talents de tous horizons, elle a mis en place et coordonné des équipes de 15 à 30 personnes pour réaliser des productions d’envergure en Suisse, en Espagne, à Paris et à New York. Elle a ainsi créé une plateforme d’images en parfaite adéquation avec le système sémantique de l’industrie du luxe. Entretissant les codes symboliques du Bongénie à ceux des marques de luxe que l’enseigne représente en Suisse, elle a également développé une direction visuelle distinctive pour les besoins spécifiques du print et du digital.
Depuis une quinzaine d’années, dans le secteur de l’horlogerie et de la joaillerie, Chopard, Richemont et Adler ont fait appel à la plume de Valérie Clerc Fromont pour angler et positionner, de manière stratégique, leurs communiqués de presse.
Définition d’un style, d’un ton et d’un champ lexical, storytelling, architecture narrative et dramaturgie de la mise en récit : elle rédige des dossiers de presse couvrant les campagnes internationales, la mise en relief des métiers d’art, les événements majeurs du calendrier horloger, les lancements de nouveaux produits tout comme les portraits des différentes muses, égéries et amabassadeurs.
Pour Chopard, elle a également œuvré à la mise en place de différentes communications autour du projet « The Journey », qui restitue le développement de Chopard vers un luxe durable, et adapté en français un ouvrage sur l’histoire et le patrimoine de la Maison, Une vie dédiée à Chopard.
“Take a lover who looks at you like maybe, you are magic”, conseillait Frida Kahlo. La tendresse kaléidoscopique du regard que l’on pose sur l’existence, voilà tout ce qui importe. C’est elle qui construit notre perception du monde, bien plus que le réel lui-même. Dans quelle lumière est-ce que l’on choisit de baigner les gens ou les objets ? Adopter un éclairage qui permette de transfigurer une existence ordinaire en un film de François Truffaut, voici la grande affaire de ma vie. C’est cette lumière que j’ai choisie pour tisser les rets de mon quotidien, construire mes relations et orchestrer mes choix professionnels. Danseuse classique, licenciée en philosophie, journaliste, directrice créative, mère, amie, amoureuse, j’ai posé ce regard et mis cette énergie dans chacune de ces séquences, et tant d’autres encore. Partout avec moi, je promène une besace de mots ébouriffés et de paysages funambules, d’étoiles facétieuses pour transfigurer le banal, le prosaïque et la morosité en une constellation radieuse, vivante et clignotante comme une rue de Shibuya-ku dans Lost in Translation. Et c’est exactement la posture que je tiens dans mon métier.
« Adopter un éclairage qui permette de transfigurer une existence ordinaire en un film de François Truffaut, voici la grande affaire de ma vie. »
Disposée aux lumières et aux parfums, aimant parler à chacun sans distinction et faisant de tout un territoire d’inspiration et de semailles prêtes à réinventer le printemps, la beauté – ou l’idée que j’ai tour à tour cru m’en faire – a occupé une grande partie de ma vie. Enfant, je me suis mise très jeune à la barre des salles de danse arides, où le piano qui accompagnait les arabesques promettait des ciels qui font croire que l’on ne mourra jamais. Comme si la seule manière de faire émerger la beauté, promesse prométhéenne, se trouvait placée dans la sculpture née de l’effort. A la faculté de philosophie ensuite, je m’intéressais aux questions d’esthétique, Aristote, Platon, Danto, Genette ; Bourdieu par-dessus tout. Puis la mode a occupé une grande partie de ma vie et grâce à elle une robe ¬– quelques robes – ont passé dans ma vie, comme le souverain murmure des derniers instants de Cyrano de Bergerac aux pieds de Roxane. J’ai cherché la beauté dans le froissement des visages et des silhouettes aperçues dans le reflet des miroirs piqués, dans les mots qui font comme du duvet, dans les fièvres plus que dans les promesses, dans la texture des gestes qui semblent vous frôler avec adoration, dans quelques renoncements plus valeureux que certains courages. J’ai aussi trouvé de la beauté dans la poésie des chaussettes sales des mômes en pagaille, dans le rire des enfants dont on a su prendre soin. Dans la tentative nécessairement mise en échec mais toujours renouvelée de voir, dans la fastidieuse et implacable répétition du quotidien, quelque chose d’aussi vaste qu’un soir de bal chez le prince de Lampedusa.
« La beauté est la chose la plus répandue du monde lorsqu’on se donne la peine de se mettre en quête d’elle ou de la peindre sur toutes les fenêtres de l’existence. »
La beauté est la chose la plus répandue au monde lorsqu’on se donne la peine de se mettre en quête d’elle ou de la peindre sur toutes les fenêtres de l’existence. Elle se trouve pêle-mêle dans le soin que l’on met à préparer un repas extraordinairement ordinaire, ou ordinairement extraordinaire, dans des jardins de trois fois rien cultivés en permaculture avec une inoxydable patience, dans les constellations qui défient les cartes du ciel comme les modèles normatifs, et que l’on agence à l’envi avec un onirisme visionnaire. Elle se trouve encore dans le passage que l’on cherche au cœur de l’hiver, dans l’asymétrie de nos visages, dans l’attention que l’on porte lorsqu’on voit s’étirer – d’une manière qui ne ressemble à aucune autre – un être qui nous est cher. Dans nos larmes et dans les voix qui sauvent de tout, dans ce souffle qui cisèle et situe. Dans les soirs d’été ou nos aspirations reposent toutes entières quelque part entre le mauve et l’orangeat des nuages, dans une main qui cherche à attraper la vôtre sous la table tout en faisant mine de suivre la conversation sur la virtuosité de Glenn Gould dans les versions comparées de 1955 et 1981 des Variations Goldberg. Dans le silence qui se tient entre les mots, dans les origamis de nos vies que l’on s’efforce de déplier et de réinventer, dans les miracles ordinaires tout comme les œuvres d’art que les spectateurs recréent indéfiniment grâce à leurs points de vue et leurs imaginaires. Dans les pas de côté, les pas chassés, les chassés croisés, les lignes de faille en éventail. Dans les corps en expansion. Ceux qui dansent, il y a de quoi déposer le monde à leurs pieds.
« L’incomparable élégance de Fred Astaire, qui seule sait vous faire croire avec désinvolture que la vie est une scène autant qu’une fête. »
Et puisque ce portrait ne serait pas complet sans une liste de quelques unes de mes lubies adorées, vous dire encore que j’aime par-dessus tout commencer à lire un roman, des romans, plein de romans en même temps sans presque jamais les finir, comme si toutes mes vies à venir dépendaient de cette frénésie, comme si je voulais toutes les vivre simultanément. J’aime les soirs d’orage où l’on trouve des bras dans lesquels se blottir, filer en Italie sur un coup de tête, les songes hypnotiques des sols en mosaïque des palais de Palerme, étreindre, sentir et danser plutôt que montrer ou pire, démontrer, les orchestres kletzmer, la beauté impériale des Erythréennes, la courbe d’une nuque aimée. L’incomparable élégance de Fred Astaire, qui seule sait vous faire croire avec désinvolture que la vie est une scène autant qu’une fête. Ceux qui s’ennuient après trois jours à la campagne, les Unes de Libé,les improbables figuiers de Thurgovie et leur parfum au petit matin, les pâtes improvisées tard dans la nuit, les odyssées empanachées des clochards célestes d’Albert Cohen, boire du vin liquoreux dans des verres en cristal très fin, les pique-niques champêtres, les odeurs de résine, le goût du yuzu, le kintsugi. Tout, tout ce qui vient du Japon, et notamment Sei Shônagon, poétesse née aux alentours de 965 et dame de compagnie de l’impératrice Teishi, qui elle-même aimait beaucoup les listes, et dont je vous restitue celle-ci :
« Des moineaux qui nourrissent leurs petits. Passer devant un endroit où l’on fait jouer de petits enfants. Se coucher seule dans une chambre délicieusement parfumée d’encens.
S’apercevoir que son miroir de Chine est un peu terni.
Un bel homme, arrêtant sa voiture, dit quelques mots pour annoncer sa visite.
Se laver les cheveux, faire sa toilette, et mettre des habits tout embaumés de parfum. Même quand personne ne vous voit, on se sent heureuse, au fond du cœur.
Une nuit où l’on attend quelqu’un.
Tout à coup, on est surpris par le bruit de l’averse que le vent jette contre la maison. »
Sei Shônagon
Journaliste, directrice éditoriale et créative, spécialisée dans l’industrie du luxe et la culture, Valérie Fromont cultive une approche holistique de la communication.